La banque : fondement, fonctionnement, défis et opportunités d’investissement
1. L’histoire de la banque et son rôle fondamental dans l’économie
2. Comment fonctionnent les banques ?
3. Les états financiers : cas concret de BNP Paribas 2024
4. Les principaux ratios bancaires expliqués
5. La réglementation bancaire : filet de sécurité et contrainte
6. Fintech vs Banques traditionnelles : la bataille pour le futur
7. Ce qui fait monter ou baisser le cours de bourse d’une banque cotée
8. Pourquoi investir dans les banques à long terme ?
1. L’histoire de la banque et son rôle fondamental dans l’économie
1.1 L’apparition des premières banques
La fonction bancaire est aussi ancienne que la civilisation elle-même.
Dans la Mésopotamie antique, il y a plus de 5 000 ans, des temples servaient déjà de lieux de dépôt : les agriculteurs y entreposaient leur grain ou leur or, en échange d’une reconnaissance écrite. Les premiers “banquiers” n’étaient donc pas des sociétés privées mais des institutions religieuses, qui garantissaient la sécurité des dépôts.
Avec l’essor du commerce, notamment en Égypte et en Grèce antique, les marchands ont commencé à proposer des services financiers : prêts contre intérêts, change de monnaie, financement d’expéditions commerciales.
1.2 L’essor médiéval et la naissance de la banque moderne
Au Moyen Âge, l’Église condamne l’usure (le prêt à intérêt) en Europe chrétienne.
Pour contourner cette interdiction, plusieurs cités marchandes (Venise, Florence, Gênes) développent des techniques financières complexes, basées sur des lettres de change, permettant aux commerçants d’échanger des fonds sans transporter d’or physique.
C’est à cette époque que naissent les premières grandes familles bancaires, telles que les Médicis à Florence, qui créent un réseau international d’agences bancaires dès le XVe siècle.
1.3 La révolution bancaire du XIXᵉ siècle
Avec la révolution industrielle, les besoins en capitaux explosent :
Construction de chemins de fer,
Développement de l’industrie lourde,
Croissance du commerce international.
Les banques commerciales modernes apparaissent pour financer ces besoins massifs.
Elles créent des modèles basés sur la transformation de maturité : emprunter à court terme (dépôts) pour prêter à long terme (crédits d’investissement).
C’est aussi au XIXᵉ siècle que naissent les banques centrales modernes, comme la Banque de France (1800) ou la Federal Reserve américaine (1913).
1.4 Le XXᵉ siècle : crises, régulations, globalisation
Le XXᵉ siècle est marqué par de grandes crises financières, en particulier :
Le krach de 1929, qui entraîne la faillite de milliers de banques américaines,
La crise bancaire de 2008, provoquée par la spéculation immobilière et les produits financiers complexes (subprimes).
Ces crises ont montré combien un système bancaire mal régulé pouvait précipiter l’économie mondiale dans la récession.
En réponse, les gouvernements imposent des régulations :
Glass-Steagall Act en 1933 aux États-Unis (séparation banque de détail / banque d’investissement),
Accords de Bâle (Bâle I, II, III) imposant des exigences de capital minimum.
1.5 Pourquoi les banques restent aujourd’hui essentielles
En 2025, malgré la digitalisation et l’arrivée des fintechs, les banques traditionnelles remplissent toujours trois missions économiques fondamentales :
Transformer l’épargne en financement de projets (immobilier, entreprises),
Assurer la stabilité du système de paiement (sécurité des transactions),
Créer de la monnaie en octroyant des crédits.
Sans banques robustes, il n’y aurait pas de croissance économique durable, car l’épargne resterait inactive et les entreprises seraient privées d’investissements.
2. Comment fonctionnent les banques ?
2.1 Le rôle central d’intermédiaire financier
La mission première d’une banque est d’agir comme intermédiaire entre ceux qui ont de l’argent (les épargnants) et ceux qui en ont besoin (les emprunteurs).
Exemple concret :
Un particulier dépose 10 000 € sur son compte épargne. La banque utilise cet argent pour financer un prêt immobilier de 200 000 € à un autre client, en combinant plusieurs dépôts.
C’est ce mécanisme qui permet à l’épargne dormante de devenir moteur de croissance économique.
La banque gagne sa vie principalement par l’écart de taux : elle rémunère les dépôts à faible taux (ex : 1 %) et prête à taux plus élevé (ex : 4 %).
2.2 La création monétaire par le crédit
Contrairement à une idée répandue, les banques créent de la monnaie quand elles octroient un prêt.
Exemple très simple :
Vous empruntez 100 000 € pour acheter un bien immobilier.
La banque inscrit 100 000 € sur votre compte.
Cet argent n’existait pas avant : il est créé au moment de l’octroi du crédit.
Ce processus augmente la masse monétaire et soutient l’économie.
Bien sûr, en contrepartie, vous devez rembourser cette somme avec intérêts.
2.3 Les différents métiers des banques et leur rôle économique
2.3.1 Banque de détail
La banque de détail s’adresse aux particuliers, PME et professionnels.
Services proposés :
Ouverture de comptes courants et d’épargne,
Distribution de moyens de paiement (carte bancaire, chèque, paiement mobile),
Octroi de crédits personnels et immobiliers,
Conseil financier.
Chiffre d’affaires généré :
Marge d’intermédiation : intérêts sur les crédits octroyés.
Frais de gestion : frais bancaires annuels, commissions sur opérations.
Gagner des parts de marché :
Développer un réseau d’agences dense,
Proposer des services digitaux performants,
Attirer les jeunes clients via des offres d’entrée gratuites ou bonifiées (ex : offres de bienvenue).
2.3.2 Banque de financement
La banque de financement accompagne principalement les grandes entreprises.
Services proposés :
Financement d’usines, d’acquisitions, d’infrastructures,
Crédits syndiqués (plusieurs banques ensemble),
Emission d’obligations.
Chiffre d’affaires généré :
Marge sur prêts aux entreprises,
Commissions sur émissions de dettes,
Frais de structuration.
Gagner des parts de marché :
Être compétitif sur les conditions de prêt,
Élargir son réseau d’entreprises partenaires,
Proposer des solutions globales (financement + conseil).
2.3.3 Banque d’investissement (BFI)
La banque d’investissement agit sur les marchés financiers.
Services proposés :
Conseil en fusions-acquisitions (M&A),
Trading sur actions, obligations, produits dérivés,
Levée de fonds en Bourse (introduction en bourse – IPO).
Chiffre d’affaires généré :
Frais de conseil en fusions-acquisitions (parfois des millions d’euros par opération),
Marge sur opérations de marché,
Commission sur levées de fonds.
Gagner des parts de marché :
Avoir une réputation d’expertise,
Être capable de réaliser rapidement des opérations complexes,
Être présent mondialement sur tous les grands marchés financiers.
2.3.4 Gestion d’actifs et banque privée
La gestion d’actifs et la banque privée visent les clients fortunés et institutionnels.
Services proposés :
Gestion de portefeuilles,
Vente de fonds d’investissement,
Conseil patrimonial (optimisation fiscale, succession).
Chiffre d’affaires généré :
Commissions de gestion sur les actifs sous mandat,
Frais de performance sur les fonds.
Gagner des parts de marché :
Offrir des produits performants,
Développer des services de conseil ultra-personnalisés,
Fidéliser par une relation client forte et de proximité.
2.3.5 Activités d’assurance
De nombreuses banques développent une activité d’assurance : santé, automobile, habitation.
Services proposés :
Assurance-vie,
Assurance-emprunteur,
Assurance prévoyance.
Chiffre d’affaires généré :
Prime d’assurance encaissée,
Commission sur produits d’assurance vendus.
Gagner des parts de marché :
Packager l’assurance avec le crédit (ex : assurance emprunteur obligatoire),
Proposer des tarifs compétitifs sur l’assurance habitation liée au compte bancaire.
2.4 Synthèse
Chaque métier bancaire génère son propre type de revenu, mais tous reposent sur deux fondamentaux :
Attirer un maximum de clients pour massifier les revenus récurrents,
Fidéliser la clientèle pour réduire les coûts d’acquisition.
Dans tous les cas, une banque qui gère mieux ses risques, ses coûts et son service client gagne en rentabilité et gagne des parts de marché.
3. Les états financiers : cas concret de BNP Paribas 2024
3.1 Comprendre le compte de résultat bancaire
Le compte de résultat d’une banque ne fonctionne pas exactement comme celui d’une entreprise classique.
3.1.1 Produit Net Bancaire (PNB)
Définition : équivalent du chiffre d’affaires pour une banque.
Composé :
Des intérêts perçus sur les crédits,
Des commissions (frais bancaires, gestion d’actifs, etc.),
Des revenus de trading et d’investissement.
BNP Paribas 2024 :
PNB = 48,831 milliards d’euros (en hausse de +4,1 % par rapport à 2023).
Lecture : La hausse modérée du PNB traduit une activité commerciale dynamique malgré un environnement économique complexe.
3.1.2 Frais de gestion
Définition : frais de fonctionnement de la banque (salaires, informatique, loyers…).
Analyse : c’est un élément clé pour juger de l’efficacité opérationnelle.
BNP 2024 :
Frais de gestion = -30,193 milliards d’euros.
3.1.3 Résultat Brut d’Exploitation (RBE)
Définition : PNB - Frais de gestion.
Indique : la rentabilité avant risque et avant impôts.
BNP 2024 :
RBE = 18,638 milliards d’euros (+7,4 %).
Lecture : Bonne dynamique opérationnelle, amélioration de l’efficacité.
3.1.4 Coût du risque
Définition : provisions passées pour couvrir les éventuelles pertes sur crédits non remboursés.
BNP 2024 :
Coût du risque = -2,999 milliards d’euros.
Lecture : Léger rebond du coût du risque (+3,2 %) par rapport à 2023, signe de prudence dans un environnement incertain.
3.1.5 Résultat Net Part du Groupe (RNPG)
Définition : bénéfice net pour les actionnaires, après impôts et éléments exceptionnels.
BNP 2024 :
Résultat net = 11,688 milliards d’euros (+4,1 %).
3.1.6 Coefficient d’exploitation
Définition : Frais de gestion / PNB.
Indique : l’efficacité de la banque (plus il est bas, mieux c’est).
BNP 2024 :
Coefficient = 61,8 % (en amélioration par rapport à 63 % en 2023).
Lecture : BNP continue de maîtriser ses coûts, ce qui est très positif pour la rentabilité.
3.2 Lecture du bilan bancaire
Le bilan bancaire est plus complexe qu’un bilan industriel.
Voici les points essentiels dans celui de BNP Paribas 2024 :
3.2.1 Actif bancaire
À l’actif, on trouve :
Caisse et banques centrales : liquidités.
BNP 2024 : 182 milliards d’euros (en baisse – gestion plus efficace du cash).
Prêts et créances sur la clientèle : crédits octroyés aux ménages et entreprises.
BNP 2024 : 900 milliards d’euros (+4,7 % vs 2023).
Lecture : Forte activité de crédit, moteur de croissance du groupe.
Instruments financiers : placements sur les marchés financiers.
BNP 2024 : 267 milliards d’euros en portefeuille de titres.
3.2.2 Passif bancaire
Au passif :
Dépôts de la clientèle : l’argent que les clients placent.
BNP 2024 (par lecture indirecte) : environ 1 034 milliards d’euros.
Dettes interbancaires : emprunts entre banques.
Capitaux propres : capital + bénéfices non distribués, servant de protection contre les pertes.
BNP 2024 :
Capitaux propres totaux = 134 milliards d’euros.
3.2.3 Le ratio CET1
Le CET1 est le ratio le plus surveillé par les régulateurs.
Définition : (Fonds propres durs) / (Actifs pondérés par les risques).
Minimum exigé : environ 10,5 % avec conservation de coussins en Europe.
BNP Paribas 2024 (données publiques disponibles) :
Ratio CET1 ≈ 13,3 %.
Lecture : BNP est bien au-dessus des exigences réglementaires, ce qui la rend solide face à des chocs économiques.
3.3 Résumé pour l’investisseur
Points forts de BNP 2024 :
Progression continue du résultat net,
Coefficient d’exploitation amélioré,
Forte activité de crédits,
Ratio CET1 très solide.
Points de vigilance :
Léger rebond du coût du risque,
Contexte géopolitique incertain pouvant peser sur la croissance du crédit
4. Les principaux ratios bancaires : comprendre leur importance
4.1 Le ratio CET1 (Common Equity Tier 1)
Définition :
Le CET1 mesure la proportion des fonds propres “durs” (capital émis + bénéfices non distribués) rapportée aux actifs pondérés par les risques (RWA).
\text{CET1} = \frac{\text{Fonds propres durs}}{\text{Actifs pondérés par les risques}}
Pourquoi c’est important :
C’est le ratio de solidité bancaire par excellence.
Plus le CET1 est élevé, plus la banque peut encaisser des pertes sans faire faillite.
Les régulateurs imposent un minimum réglementaire : autour de 10,5 % en Europe.
Exemple BNP Paribas 2024 :
CET1 ≈ 13,3 % (très supérieur au seuil requis).
Lecture : BNP Paribas est parfaitement capitalisée. En cas de choc (ex : crise financière, vague de défauts de crédit), elle dispose d’un coussin important pour résister.
4.2 Le leverage ratio
Définition :
Le leverage ratio mesure les fonds propres par rapport à l’ensemble des expositions (prêts, titres, engagements hors bilan) sans pondération par les risques.
\text{Leverage Ratio} = \frac{\text{Fonds propres}}{\text{Total des expositions}}
Pourquoi c’est important :
Il limite l’endettement absolu d’une banque.
Même si une banque prend très peu de risques apparents (RWA faibles), elle ne peut pas gonfler son bilan indéfiniment.
Norme réglementaire : minimum 3 % imposé par Bâle III.
Exemple BNP Paribas 2024 (donnée indicative) :
Leverage ratio autour de 4,5 %.
Lecture : BNP reste modérément endettée par rapport à son capital, ce qui renforce sa stabilité.
4.3 Le LCR (Liquidity Coverage Ratio)
Définition :
Le LCR mesure la capacité d’une banque à faire face à ses besoins de liquidités sur 30 jours en situation de crise.
LCR = Actifs liquides de haute qualité \ Sorties nettes de liquidité sur 30 jours
Pourquoi c’est important :
En cas de crise (ex : retrait massif des dépôts), la banque doit pouvoir survivre 30 jours sans soutien extérieur.
Le LCR doit être supérieur à 100 %.
Exemple BNP 2024 :
LCR supérieur à 130 %.
Lecture : BNP peut résister plus d’un mois à une crise de liquidité sans vendre d’actifs en catastrophe.
4.4 Le NSFR (Net Stable Funding Ratio)
Définition :
Le NSFR mesure si une banque dispose de sources de financement stables pour couvrir ses actifs à plus d’un an.
NSFR = Ressources stables \ Besoins de financement stables
Pourquoi c’est important :
Évite le financement de prêts à long terme par des ressources à court terme (risque de rupture de financement).
Norme minimum exigée : 100 %.
Exemple BNP Paribas 2024 :
NSFR également supérieur à 110 %.
Lecture : BNP finance ses crédits à long terme avec des ressources durables, limitant son risque de refinancement.
4.5 Le coût du risque
Définition :
Le coût du risque représente les pertes attendues sur les crédits : provisions passées pour couvrir d’éventuels défauts.
Pourquoi c’est important :
Plus le coût du risque est faible, plus la banque conserve une part importante de ses revenus.
C’est un excellent indicateur de la qualité de portefeuille de crédits.
Exemple BNP Paribas 2024 :
Coût du risque = -2,999 milliards d’euros,
Stabilité par rapport à 2023 malgré un contexte économique plus risqué.
Lecture : Le portefeuille de crédit de BNP est globalement sain.
4.6 Le coefficient d’exploitation (Cost-to-Income Ratio)
Définition :
Rapport entre frais de gestion et produit net bancaire.
Coefficient d'exploitation = Frais de gestion \ PNB
Pourquoi c’est important :
Mesure l’efficacité opérationnelle de la banque.
Plus il est bas, plus la banque est rentable.
Exemple BNP 2024 :
Coefficient = 61,8 % (contre 63 % en 2023).
Lecture : Amélioration continue de l’efficacité, signe positif pour les marges futures.
Synthèse rapide des ratios sur BNP 2024 :
Ratio
Valeur
Lecture
CET1
≈ 13,3 %
Solide
Leverage
≈ 4,5 %
Faible endettement
LCR
> 130 %
Excellente liquidité
NSFR
> 110 %
Bonne stabilité du financement
Coût du risque
2,999 Mds€
Contrôlé
Coefficient d’exploitation
61,8 %
Efficace
5. La réglementation bancaire : filet de sécurité et contrainte économique
5.1 Pourquoi réguler les banques ?
L’histoire financière mondiale nous a appris une leçon majeure :
Une banque en difficulté peut entraîner l’ensemble de l’économie avec elle.
Contrairement à une entreprise classique, les banques sont systémiques :
Elles détiennent l’épargne des ménages,
Elles financent les entreprises et les États,
Elles assurent la fluidité des échanges commerciaux.
Exemple historique :
Lors de la crise de 2008, la faillite de Lehman Brothers a provoqué un arrêt brutal du crédit mondial, plongeant l’économie dans une récession majeure.
Objectif de la régulation :
Réduire le risque de faillite systémique,
Protéger les épargnants,
Maintenir la confiance dans le système financier.
5.2 Les grandes règles mises en place : focus sur Bâle III
Après la crise de 2008, la réglementation bancaire a été renforcée de manière drastique.
Le pilier principal de cette réforme est Bâle III, un ensemble de normes internationales adoptées par le Comité de Bâle.
Les exigences clés de Bâle III :
Renforcement des fonds propres
Imposer un minimum de CET1 solide.
Ajouter des coussins supplémentaires : conservation et systémique pour les plus grandes banques.
Limitation de l’endettement (Leverage ratio)
Empêcher les banques de grossir sans limite par effet de levier.
Gestion de la liquidité
LCR : être capable de survivre 30 jours de crise.
NSFR : avoir des financements stables pour le long terme.
Stress tests réguliers
Simuler des scénarios extrêmes (récession, crise financière) pour vérifier la solidité des bilans.
5.3 Conséquences positives pour les banques
Renforcement de la confiance des investisseurs et des clients,
Plus grande stabilité économique et financière,
Diminution du risque de faillite systémique.
Exemple :
BNP Paribas aujourd’hui affiche un ratio CET1 de 13,3 %, preuve de son respect strict des normes Bâle III, renforçant sa résilience.
5.4 Les coûts de la régulation pour les banques
La régulation n’est pas sans conséquences économiques pour les établissements bancaires.
Impacts directs :
Augmentation des coûts de conformité (plus de reporting, de contrôles internes),
Réduction des effets de levier, donc des rendements potentiels,
Frein temporaire sur la croissance car les banques doivent conserver plus de capital.
Exemple concret :
Un projet très rentable, mais très risqué, pourrait être abandonné si son poids en actifs pondérés (RWA) dégrade trop le ratio CET1.
5.5 Focus : les banques face aux Fintechs et la réglementation allégée
Les Fintechs comme Revolut, N26 ou Monzo ne sont pas (encore) soumises aux mêmes contraintes qu’une banque systémique classique :
Banque classique
Fintech
Fonds propres imposés
Oui
Non (souvent pas d’obligation CET1)
Ratios de liquidité obligatoires
Oui
Rarement
Stress tests
Oui
Non
Contrôle réglementaire lourd
Oui (ACPR, BCE)
Allégé ou national
Conséquences :
Les fintechs peuvent offrir des services bancaires à bas coûts (ex : comptes gratuits, virements instantanés sans frais),
Elles sont plus agiles, plus rapides, plus innovantes.
Exemple récent :
En 2024, Revolut a annoncé un résultat net historique tout en continuant sa croissance client, car elle est moins contrainte par des exigences coûteuses que BNP ou Société Générale.
Cependant, ces néobanques doivent progressivement renforcer leurs fonds propres pour obtenir des licences bancaires complètes dans certains pays.
5.6 Vers une convergence réglementaire ?
Avec leur succès, les Fintechs sont de plus en plus dans le viseur des régulateurs.
L’objectif est clair :
Garantir que même les nouveaux acteurs soient solides financièrement,
Éviter des risques systémiques créés par une fintech de taille mondiale.
Exemple : en Europe, le projet de réglementation DORA (Digital Operational Resilience Act) vise à imposer des standards élevés de sécurité et de résilience aux fintechs.
En résumé :
La régulation protège la stabilité, mais coûte cher aux banques traditionnelles.
Les Fintechs ont profité d’une fenêtre d’opportunité grâce à une régulation plus légère.
À terme, une convergence s’imposera, ramenant un certain équilibre concurrentiel.
6. Fintech vs Banques traditionnelles : la bataille pour le futur de la finance
6.1 L’ascension fulgurante des Fintechs
Depuis une quinzaine d’années, des acteurs innovants ont révolutionné le monde bancaire :
les Fintechs (Financial Technology Companies).
Exemples célèbres :
Revolut (Royaume-Uni),
N26 (Allemagne),
Monzo (Royaume-Uni),
Wise (anciennement TransferWise, Royaume-Uni).
Leur promesse :
Simplifier l’expérience utilisateur,
Réduire les frais bancaires,
Donner accès à des services rapides, intuitifs, souvent accessibles depuis un smartphone en quelques clics.
6.2 Pourquoi les Fintechs séduisent-elles autant ?
1. Simplicité d’utilisation
Ouverture de compte en quelques minutes.
Gestion 100 % mobile (pas besoin d’agence).
2. Frais réduits voire nuls
Pas de frais de tenue de compte,
Virements gratuits,
Cartes bancaires sans frais à l’étranger.
3. Innovation constante
Alertes en temps réel,
Gestion des abonnements,
Cryptomonnaies accessibles depuis l’application.
Exemple : Revolut propose la gestion de plusieurs devises directement sur l’application, au taux de change interbancaire.
6.3 Les limites du modèle Fintech
Malgré leur succès, les Fintechs présentent aussi des faiblesses structurelles :
Faiblesses
Conséquences
Moins de capitalisation
Vulnérabilité en cas de crise économique
Peu ou pas d’activité de crédit classique
Revenus limités uniquement aux commissions
Rentabilité encore fragile
Forte dépendance à la croissance du nombre de clients
Régulation encore légère
Risque d’encadrement plus strict dans le futur
Exemple récent :
N26 a dû suspendre ses ouvertures de comptes en France pendant plusieurs mois pour se mettre en conformité avec les régulateurs européens.
6.4 Le cas Revolut : la Fintech devenue monstre
Revolut est probablement le meilleur exemple de Fintech ayant réussi sa transformation.
Quelques chiffres marquants (2024) :
Plus de 40 millions de clients dans 40 pays,
Résultat net positif en 2024 : Revolut a généré plus de 500 millions d’euros de bénéfices,
Diversification dans la bourse, l’assurance, la cryptomonnaie.
Comment Revolut gagne-t-elle de l’argent ?
Commissions sur opérations de change,
Abonnements premium (Revolut Premium / Metal),
Ventes d’assurances voyages,
Trading d’actions et cryptomonnaies.
Lecture : Revolut devient progressivement un acteur bancaire complet, mais sans les contraintes historiques lourdes des banques traditionnelles.
6.5 Comment réagissent les banques traditionnelles ?
Face à cette concurrence :
1. Accélération de la transformation digitale
Développement d’applications mobiles performantes (ex : Hello Bank! pour BNP Paribas, Ma French Bank pour La Banque Postale).
Digitalisation des parcours clients : ouverture de compte en ligne, crédit instantané.
2. Réduction des coûts structurels
Fermeture d’agences physiques devenues peu rentables,
Investissements massifs dans l’optimisation IT.
3. Lancement de néobanques internes
Exemples :
Boursorama (filiale de Société Générale),
Fortuneo (filiale de Crédit Mutuel Arkéa).
6.6 Fintech vs Banque : comparaison complète
Critère
Banque traditionnelle
Fintech
Offre de services
Complète (épargne, crédit, assurance)
Partielle mais en expansion
Sécurité financière
Très forte (fonds propres élevés)
Variable selon la licence bancaire
Frais bancaires
Moyens à élevés
Très bas
Relation client
Humaine (conseiller dédié) ou digitale
100 % digitale
Régulation
Très stricte
Plus souple mais en évolution
Résilience en crise
Élevée
À prouver
6.7 Quel futur pour la finance ?
À moyen terme :
Les fintechs continueront d’innover et de capter des parts de marché sur les services simples (paiements, cartes, transfert d’argent).
Les banques traditionnelles resteront dominantes sur les activités complexes (crédits, investissements institutionnels, gestion d’actifs).
À long terme :
Fusion progressive des modèles : les meilleures Fintechs deviendront de vraies banques, et les banques traditionnelles deviendront de plus en plus digitales.
Conclusion de cette bataille :
Ce n’est pas une opposition. C’est une évolution du secteur vers plus d’efficacité, plus de choix pour les clients… et plus d’exigence pour tous les acteurs.
7. Ce qui fait monter ou baisser le cours de bourse d’une banque cotée
Comprendre ce qui influence la valorisation d’une banque en Bourse est essentiel pour tout investisseur sérieux.
Le cours d’une banque ne dépend pas que de ses bénéfices : il est sensible à de nombreux facteurs macroéconomiques, financiers et réglementaires.
7.1 La croissance économique générale
Pourquoi c’est important :
Une économie en croissance entraîne plus de prêts, plus d’investissements, donc plus de revenus bancaires.
À l’inverse, en récession, la demande de crédit chute et le coût du risque grimpe.
Exemple :
En 2021-2022, la reprise post-Covid a boosté les résultats des banques (+ hausse des crédits immobiliers, + investissements d’entreprise).
En 2023-2024, les craintes de récession en Europe ont pesé sur les valorisations bancaires.
Lecture : Une banque est cyclique : elle suit l’économie.
7.2 L’évolution des taux d’intérêt
Pourquoi c’est important :
Les banques gagnent leur vie en prêtant plus cher qu’elles ne rémunèrent les dépôts.
Plus les taux sont élevés, plus leur marge d’intermédiation augmente.
Exemple concret :
En 2022-2023, les hausses rapides des taux par la BCE et la Fed ont dopé les marges des banques,
Résultat : explosion des profits pour BNP Paribas, Santander, etc.
Attention :
Si les taux montent trop vite, cela peut freiner la demande de crédit (moins d’emprunts immobiliers, ralentissement économique).
Lecture : Les banques aiment des taux modérés et en hausse progressive.
7.3 Le coût du risque
Pourquoi c’est important :
Plus il y a de clients qui remboursent mal, plus la banque doit passer des provisions (coût du risque), qui rognent directement sur son bénéfice.
Exemple :
Pendant la crise de 2008, les banques ont dû provisionner des dizaines de milliards d’euros.
En 2024, le coût du risque de BNP reste sous contrôle malgré un contexte tendu : 2,999 milliards d’euros, ce qui est relativement modéré.
Lecture : Une hausse brutale du coût du risque effraie les investisseurs.
7.4 La qualité du portefeuille de crédits
Pourquoi c’est important :
Tous les prêts ne se valent pas :
Prêter à une grande entreprise solide = faible risque,
Prêter à une entreprise fragile = risque élevé.
Indicateur clé : le taux de prêts non performants (NPL - Non Performing Loans).
Exemple :
Une banque avec un taux de NPL à 3 % est beaucoup plus solide qu’une banque avec 8 % de NPL.
Lecture : Un portefeuille sain est un gage de stabilité future.
7.5 La pression réglementaire
Pourquoi c’est important :
De nouvelles exigences réglementaires peuvent réduire la rentabilité :
Besoin de lever plus de capital (baisse du ROE),
Limitation des activités les plus rentables (ex : trading risqué).
Exemple :
Après 2008, la mise en place de Bâle III a obligé les banques à renforcer leurs fonds propres, ce qui a temporairement freiné la croissance.
Lecture : Trop de régulation = rentabilité sous pression.
7.6 L’innovation et la concurrence des Fintechs
Pourquoi c’est important :
Si une banque rate sa transformation numérique, elle risque de perdre des parts de marché face aux Fintechs ou néobanques.
Exemple :
Entre 2017 et 2024, Revolut, N26 et Wise ont capté des millions de jeunes clients en Europe, au détriment des banques traditionnelles.
Réaction des grandes banques :
Investissements massifs dans le digital,
Offres mobiles et personnalisées.
Lecture : Une banque qui innove conserve sa base client et donc ses revenus futurs.
7.7 La confiance du marché et les crises financières
Pourquoi c’est important :
Les banques fonctionnent sur la confiance.
Une rumeur de difficulté financière peut provoquer des retraits massifs (bank run).
Exemple récent :
En 2023, la chute de SVB (Silicon Valley Bank) a entraîné une chute brutale des valeurs bancaires aux États-Unis et en Europe, même pour des groupes très solides.
Lecture : Même une banque solide peut voir son cours plonger si le climat de confiance général se détériore.
7.8 Synthèse : comment évaluer si une banque est attractive en Bourse ?
Un investisseur doit regarder :
Facteur clé
Ce qu’il faut viser
Croissance économique
Positive
Niveau des taux d’intérêt
Modérément élevés
Coût du risque
Faible et stable
Qualité des actifs
Portefeuille de crédits sain
Ratio CET1
> 12 % idéalement
Coefficient d’exploitation
< 65 %
Innovation digitale
Forte
Lecture finale : Une banque solide, bien gérée, peu endettée et digitalement avancée est un actif précieux à long terme.
8. Pourquoi les banques doivent faire partie d’un portefeuille d’investissement long terme
8.1 Un rôle central et irremplaçable dans l’économie
Quelle que soit l’évolution technologique, les banques resteront essentielles :
Collecter l’épargne,
Transformer cette épargne en crédits pour les ménages et entreprises,
Assurer la fluidité des paiements,
Financer l’économie réelle.
Même si des Fintechs innovent sur les paiements ou l’épargne simple, elles ne réalisent pas à grande échelle l’activité de transformation bancaire, qui est au cœur du développement économique.
Lecture : Sans banques solides, il n’y a ni investissement massif, ni croissance économique durable.
8.2 Des entreprises plus solides qu’auparavant
Depuis la crise financière de 2008, les banques traditionnelles ont radicalement changé :
Ratios CET1 élevés (souvent >13 %),
Financements stables (LCR et NSFR largement au-dessus des minima),
Coût du risque mieux anticipé,
Liquidité abondante,
Diversification internationale.
Exemple :
BNP Paribas, Santander ou ING disposent aujourd’hui de coussins de sécurité et d’outils de gestion de crise beaucoup plus solides que dans les années 2000.
Lecture : Les banques systémiques sont devenues des forteresses réglementées.
8.3 Un soutien implicite des États
L’histoire l’a démontré : les banques systémiques ne peuvent pas être abandonnées sans risque majeur pour l’économie nationale.
Si une grande banque fait faillite, c’est tout le système économique qui est menacé (blocage du crédit, chute de l’investissement, panique des épargnants).
Par conséquent, les gouvernements et les banques centrales interviennent en dernier recours.
Exemple :
En 2020 (crise Covid), les États européens et la BCE ont apporté des lignes de liquidité massives aux banques pour maintenir la stabilité financière.
Lecture : Posséder des banques, c’est miser sur un actif implicitement soutenu en cas de crise systémique.
8.4 Des entreprises génératrices de cash-flow et de dividendes
Les banques génèrent des profits réguliers grâce :
À la marge d’intermédiation,
Aux frais de service,
Aux commissions financières.
Et surtout : elles redistribuent une part importante de leurs bénéfices sous forme de dividendes.
Banque
Rendement du dividende en 2024
BNP Paribas
6,2 %
Société Générale
7,5 %
Santander
5,8 %
Lecture : Dans un portefeuille long terme, les banques offrent un flux de dividendes attractif, renforçant la performance totale (dividendes réinvestis).
8.5 Des valorisations parfois sous-estimées
À cause de leur profil cyclique et de la mémoire des crises passées, les banques sont souvent valorisées à la baisse par le marché.
PER (Price Earnings Ratio) faibles,
Valorisation parfois inférieure à leur valeur comptable (P/B < 1).
Exemple :
En 2024, certaines grandes banques européennes se négocient à 0,6 ou 0,7 fois leur valeur comptable, soit un rabais par rapport à leur valeur intrinsèque.
Lecture : Pour un investisseur patient, les banques représentent souvent des opportunités d’achat à des niveaux de valorisation intéressants.
8.6 Les risques à surveiller
Bien sûr, investir dans les banques n’est pas sans risques :
Crises économiques imprévues,
Hausse brutale du coût du risque,
Évolutions réglementaires défavorables,
Ralentissement de l’innovation digitale face aux Fintechs.
Mais :
Un portefeuille équilibré, sélectionnant les banques solides, internationales, bien capitalisées et digitales réduit considérablement ces risques.
Conclusion générale
Investir dans des banques, c’est miser sur la croissance de l’économie réelle, sur la solidité d’institutions régulées et soutenues et sur des flux de dividendes attractifs.
Bien sélectionnées et intégrées dans une stratégie long terme, les banques restent des piliers fondamentaux d’un portefeuille diversifié, au même titre que l’immobilier, les infrastructures ou les grandes entreprises industrielles.
Dans un monde en constante évolution, la banque se transforme, s’adapte, mais demeure.
Résumé final en 12 points
Résumé de l’article :
Les banques sont des institutions centrales, présentes depuis l’Antiquité, essentielles à la croissance économique.
Elles fonctionnent comme des intermédiaires entre épargnants et emprunteurs, et créent de la monnaie par le crédit.
Elles exercent plusieurs métiers complémentaires : banque de détail, financement, investissement, gestion d’actifs, assurance.
Chaque métier génère des revenus spécifiques, tout en luttant pour capter de nouvelles parts de marché.
Le bilan bancaire est unique : les dépôts sont au passif, les crédits à l’actif ; la lecture des actifs risqués est cruciale.
Les ratios comme le CET1, le LCR, le Leverage Ratio et le coût du risque permettent d’évaluer la solidité d’une banque.
La réglementation (Bâle III) a renforcé la stabilité mais pèse sur la rentabilité des banques traditionnelles.
Les Fintechs bousculent le modèle bancaire classique, mais restent vulnérables face aux crises majeures.
Une banque bien gérée tire profit des cycles économiques et d’une hausse modérée des taux d’intérêt.
Le coût du risque, la qualité des actifs et la capacité d’innovation digitale sont des facteurs clés de valorisation en Bourse.
Les banques solides génèrent des flux de trésorerie stables et versent des dividendes attractifs.
Malgré les défis, les banques restent des piliers indispensables dans un portefeuille diversifié à long terme.